Jérôme Admin
Messages : 482 Date d'inscription : 26/11/2007 Age : 36 Localisation : Montpellier
| Sujet: Colonel Déodat du Puy-MONTBRUN Ven 6 Mar 2009 - 16:57 | |
| Lors de mon séjour à Paris avec mon unité, où nous étions section d'honneur, nous avons été appelés aux Invalides pour participer aux obsèques du Colonel Déodat du Puy-MONTBRUN. Petit résumé de sa carrière militaire : Ce Languedocien long et maigre à la sensibilité d'écorché, sombre, fier et solitaire comme le chevalier de Dürer, toujours: en quête de perfection, c'est l'homme des commandos, de la contre guérilla et des missions spéciales. Plongeur, alpiniste, Déodat du Puy-Montbrun a manié toutes les armes y compris l'explosif, l'arme blanche, le déguisement et quelques petites merveilles conçues dans les laboratoires du contre-espionnage. Parachuté en France Participant avec les SAS britanniques à une opération parachutée en jungle malaise, en novembre 1952, contre les guérilleros communistes, il a reçu plus tard du colonel Sloane, commandant le 22e SAS, une lettre où l'on peut lire: "Vous nous avez grandement impressionnés. Nous vous considérons comme un soldat hors du commun (" outstanding soldier"), Il avait fait l'admiration des Anglais au cours d'une poursuite de 15 jours en pleine jungle (1). C'est qu'il avait déjà derrière lui une longue expérience. En 1940, à vingt ans, il a connu le rude choc des panzers allemands, et les bombardements des stukas. Blessé le 24 juin dans un combat pour l'honneur, il s'évade du lazaret allemand où il est soigné. Repris il saute du camion qui le transporte vers l'Allemagne. Il est recueilli mourant par des fermiers. Dès qu’il le peut, il passe en zone libre. Volontaire pour la Syrie, il y est pris en mains par l'Intelligence Service et accepte de " travailler" en France pour son compte. Au moment de l'occupation de la zone libre, il prend contact avec le réseau CND, de Rémy. Passé aux Forces Françaises combattantes, il porte le n° F.F.L. 12.881. Il est du groupe qui forme le réseau. F.F. C. Andalousie, créé par François Bistos, où il assure en particulier les missions de protection et de sécurité. En situation trop dangereuse, son "patron" l'envoie en Angleterre. Breveté parachutiste à Ringway, il reçoit l'instruction des SAS, et des" Jedbjurghs ". Parachuté, il accomplira encore en France et hors de France, des missions de l'ombre jusqu'à l'armistice. Elles lui valent, à 25 ans, la Légion d'honneur. Toujours se dépasser En 1945, il entre au service Action du contre-espionnage français, participe à la création de son centre de Cercottes, puis étant au choc se porte volontaire pour l'Indochine où il restera presque sans interruption de 1950 à 1955. Officier aux Troupes aéroportées, le général de Lattre le prend comme aide de camp ce qui ne l'empêche pas de participer à plusieurs opérations et de monter des " coups" très particuliers. "Puy-Montbrun,' écrit Lucien Bodard dans l'Aventure, ne consent à demeurer à la cour du "roi Jean" qu'à condition d'avoir de temps en temps une" permission ". Alors, il monte sur une chaloupe d'une étrange Armada, une flottille en embuscade sur les houles de la mer de Chine, là où elles déferlent contre la côte de l'Annam rouge. "Soudain, quand il y a un " tuyau" à exploiter, c'est le débarquement nocturne, le raid sanglant à travers les ténèbres. Leur marche d'approche, c'est celle du silence, celle d'ombres. Si tout va bien, il leur faut tuer et détruire en quelques minutes, avec une précision absolue. Et, si le boulot a été fait sans accroc, il leur reste à s'enfuir au galop vers leurs canots. C’est cette fuite qui est la plus périlleuse. Souvent, il faut combattre pour" décrocher". Il Y a des blessés, des tués à emporter. Chaque fois, le réembarquement est un " miracle"
(1) Les parachutistes atterrissaient sur des arbres atteignant une hauteur de 60 mètres et plus. De ces cimes, les hommes se laissaient glisser au sol par une corde de " rappel ".
Ce type d'opérations, il en est l’initiateur au sein du Groupe de commandos mixtes aéroportés commandé au départ par le colonel Gral. e G.C.MA a été institué à la fin de 1950 sur les directives du colonel Belleux, chef des Services spéciaux (S.D.E.C.E.) à Saigon et du colonel Fille-Lambie, alias Morlane, qui dirige à Paris le service action du S.D.E.C.E. Sa mission générale: créer l'insécurité en zone vietminh, s'infiltrer dans la jungle ou ne s’aventurent plus les bataillons, débarquer clandestinement sur les côtes, préparer par le renseignement et l’action, les grandes opérations combinées, enfin implanter des maquis. Puy-Montbrun est une .des figures de proue du G.C.M.A. formé de paras d'élite, sachant tout faire, capables de résister à la solitude, à l’horreur, à l’angoisse de la traîtrise, à la fatigue, à la maladie, à la peur dont nul n'est à l'abri. Durant trente mois avec son groupe Action, le capitaine du Puy-Montbrun multiplie les actions de contre-guérilla et de commando. Débarquements en zone rebelle (plus de 20 fois entre juillet et décembre 1952 implantation d'agents, sabotages, destruction de jonques, recherche de prisonniers.
Lucien Bodard l'a dépeint avec Gral et Claude Barrès, comme" le représentant d'une nouvelle race d'hommes de sang, de curieux saints.Il l’a vu »Méridional austère, puritain et même tout proche du mysticisme. S'il tue, et même le plus possible, c est par moralisme ". Il se bourre la tête de tout un pathos philosophique qui sera celui des paras «défenseurs de l'Occident". Son ascétisme se retrouvera en eux, car ils ont toujours coté moine, même mêlé à d'autres penchants bien différents. Mais lui, Puy-Montbrun est en entier dans sa métaphysique, elle le ronge. Derrière sa force marquée par des traits réguliers, une noble stature et une voix grave, c'est toujours l'inquiétude, où est le devoir le plus grandiose, le sacrifice le plus parfait, le renoncement le plus total? Chaque fois, il lui faut trouver la solution digne du soldat, du héros, du chrétien un peu archange. Certes pour lui le sang versé ne compte pas. Celui des autres comme le sien. Il est en proie à un idéal qui l'oblige à constamment se surmonter, à s'engager dans des épreuves toujours plus audacieuses, qui ne peuvent finir qu'avec la mort. Mais il vit, il survit toujours … De 1951 à 1953, six citations (dont l’une vietnamienne) et la rosette de la Légion d'honneur (" Officier prestigieux d'un courage et d’une audace légendaires ...,) lui rendent hommage.
Après trente-trois mois de séjour, Puy-Montbrun rejoint la France, passe le brevet de moniteur parachutiste, retrouve le service Action et Cercottes. Mais un nouvel engin fait son apparition l’hélicoptère. Il est pressenti pour former une unité de commandos opérant à partir de ces engins, il repart pour l’Indochine au printemps 1954.
Un pionnier des « hélicos » opérationnels
Dans la nuit du 19 au 20 juin 1954 avec un commando vêtu de quéquan noirs à la mode vietminh, il effectue un saut opérationnel au milieu d’ un orage tropical, avec le sergent-chef Taxi, plus tard tué en Algérie. Une partie du commando est récupérée en hélicoptère par le Cdt Crespin, le « père » de l’héliportage opérationnel. Une nouvelle forme d’action est ouverte. Elle sera mise au point en Algérie. Puy-Montbrun reste en Algérie sans interruption de 1955 à 1961 ; Au cours de ces six années, il n’oubliera pas ses anciennes attaches avec le service Action du S.D.E.C.E et participera à l’occasion en dehors du service, à la lutte contre les trafiquants d’armes qui alimentent les rebelles. Nommés chef d’escadrons en 1956, il est chef des formations d’hélicoptères opérationnels (« F.H.O. ») du groupe d’hélicoptères n°2 alors sous les ordres du Lt Colonel Crespin. Au G.H. 2 dont il deviendra plus tard le chef de corps, on effectue les premiers vols de nuit. Pour la première fois, on arme les hélicoptères. Avec ses pilotes, Puy-Montbrun découvre tous les jours le moyen de poser les appareils sur des « Dropping zones » réputées impossibles. Les équipages sont presque tous des parachutistes. Transports opérationnels, évacuations sanitaires de jour, de nuit et par tout temps deviennent pour eux des missions sacrées. Seul un commando peut savoir ce que représente l’arrivée d’un hélico pour une patrouille clouée au sol. Inlassable, il accomplit 3000 heures de vols opérationnels et 45 E.V.S de nuit. Le record. Chef de corps et pilote, il crée des commandos pour la propre protection de son unité. Le 29 Avril 1958, ayant largué son commando au plus près d’une importante résistance rebelle, il se fait lui-même déposer à terre pour redresser le dispositif dans une voie dangereuse. Il est gravement blessé au cours de l’action. Il est fait commandeur de Légion d’honneur le 26 Septembre 1956, à 38 ans. La citation qui accompagne cette promotion le qualifie de «chevalier sans peur et sans reproches ». Il est encore quatre fois cité après cette distinction. Ce qui est un cas rare.
Mis à la retraite d’office
Il est titulaire de 19 citations avec les croix de guerre 39-45 et T.O.E. de la valeur militaire et la croix de la vaillance vietnamienne. Il a reçu la médaille de l’aéronautique, la médaille des évadés, la rosette de la résistance, la médaille d’or du service de santé, la fourragère T.O.E. à titre individuel, la kings’medal, la malayan medal. Blessé trois fois, il totalise 26 titres de guerre. Il est l’un des officiers les plus titrés de sa génération. En 1961-1962, commandant en second de la base école des troupes aéroportées, il est noté par son chef le colonel Brothier, l’ancien patron de la légion, un expert qui le considère comme « l’un des plus brillants officiers supérieurs qui me fut donné d’ avoir sous mes ordres ». Et pourtant… cet officier classé « Elite » pratiquement partout est soudainement invité à demander sa mise à la retraite. Il refuse. Il est alors placé à la retraite d’office sans explication. Puy-Montbrun n’a pas appartenu à l’O.A.S. Mais à trois reprises, en grand uniforme, décorations pendantes, il est allé au tribunal témoigner en faveur d’anciens subordonnés ou des camarades de l’adjudant Robin en particulier. Celui-ci défendu par Me Tixier-Vignancourt risquait sa tête. A l’issue des déclarations de Puy-Montbrun le fameux avocat s’est levé pour dire en substance : « Après un tel témoignage ma plaidoirie devient inutile. » Faut-il voir là la cause de cette éviction prématurée d’une armée qu’il avait servie avec passion et même fanatisme ?(Source : http://historia-legio.forum-actif.eu)J'ai pu prendre en photos les deux coussins où reposaient ses décorations (L'un des militaires les plus décorés après Bigeard). Je pense avoir eu une très grande chance en participant à ses obsèques, mais cela nous rappelle que des vétérans décèdent tous les jours (souvent dans l'anonymat), et qu'il est important de continuer ce que nous faisons au sein de l'association... Un détachement du 5e RHC portaient le cercueil... | |
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